Le blocus naval contre le Venezuela au centre de la stratégie impérialiste – Ernesto CAZAL

1 juillet 2020

L’asphyxie économique, financière et commerciale que le Gouvernement des Etats-Unis impose à la République Bolivarienne du Venezuela est une pièce de plus du casse-tête dans la stratégie de guerre illimitée qu’il met en place contre le pays de la Corne des Caraïbes.

En particulier, il a des répercussions sur la carte de navigation des bateaux vénézuéliens ou des bateaux qui ont des relations commerciales et d’autres sortes avec l’Etat et les entreprises privées. Pour soutenir un tel ordre du jour d’asphyxie, la Marine étasunienne se déploie dans tous les coins de la planète avec un fonctionnement qui s’apparente à celui d’une police militaire et mobile pour des opérations navales et des manœuvres militaires de différentes sortes.

La doctrine du Pentagone comprend autorisation de circulation pour eux-mêmes et leurs alliés auxquels ils font le plus confiance et une restriction militaire pour tous ceux qui naviguent sous des pavillons sanctionnés par le Département du Trésor ou qui menacent militairement leurs plans et ceux de la Maison Blanche.

Le Venezuela est harcelé, ces dernières années, par cette stratégie qui, avec le blocus mis en place par Washington et ses conséquences, plus d’autres opérations en faveur du « changement de régime » tracent un cercle en haute mer et à l’orée des côtes caribéennes.

Le principal projet : l’industrie pétrolière

Récemment, l’agence Reuters a rapporté que des pétroliers avec un chargement de pétrole prêt à être commercialisé « ont été pris » en haute mer, il y a presque 2 mois, parce que « les raffineries du monde entier refusent le pétrole du pays sud-américain pour ne pas être sanctionnées par les Etats-Unis, selon des sources de l’industrie, des documents de PDVSA et des données d’envoi. »

Les exportations de pétrole de PDVSA sont la principale cible de Washington

En même temps que le Département du Trésor inscrit sur une liste noire les bateaux et les commerçants qui s’impliquent dans le commerce et le transport du pétrole vénézuélien, il menace d’ajouter plus d’entités sur sa liste d’entités « sanctionnées. »

Reuters cite les données de Refinitiv Eikon:

« Au moins 16 pétroliers qui transportent 18 100 000 barils de pétrole vénézuélien ont été pris dans les eaux du monde entier alors que les acheteurs les évitent pour éviter les sanctions. Cela correspond à presque 2 mois de production au taux de production actuel du Venezuela. »

L’agence raconte que certains de ces bateaux « ont été en haute mer pendant plus de 6 mois et ont navigué vers différents ports mais n’ont pas pu décharger. Les chargements de pétrole se chargent rarement sans qu’il y ait un acheteur. Ceux qui se trouvent dans les eaux sans avoir d’acheteur vendent généralement à perte. »

La charge financière de chaque pétrolier atteint des pertes de plus en plus importantes à mesure que le retard de déchargement du brut augmente. Le coût d’un bateau qui transporte du pétrole vénézuélien est d’au moins 30 000 $ par jour.

Les compagnies pétrolières qui ont PDVSA pour client n’ont pas pu trouver d’acheteurs à cause des mesures coercitives unilatérales des Etats-Unis. « Même les clients de longue date de PDVSA luttent pour finir les transactions permises sous les sanctions, pour le paiement de la dette ou l’échange d’aliments, » signale un de ses membres à Reuters anonymement.

C’est une situation difficile pour les exportations vénézuéliennes, à un moment où la plupart des pays producteurs de pétrole continuent à avoir des difficultés pour commercialiser leur forte production sur un marché excédentaire.

Tout cela aide les Etats-Unis à faire diminuer l’appétit de beaucoup d’acheteurs pour le pétrole vénézuélien

A la base, ce que le Gouvernement de Donald Trump a réussi à faire, c’est mettre en place un blocus naval en haute mer sur le commerce de brut vénézuélien en évitant que l’Etat dirigé par Nicolás Maduro puisse se procurer des devises pour approvisionner la République Bolivarienne et sa population en biens et services essentiels tout en minant l’industrie pétrolière gérée par PDVSA.

Cet objectif était clair dès le début, quand Trump a décidé d’émettre, l’année dernière, un ordre exécutif qui renforce le cadre des « sanctions » économiques, financières et commerciales contre le Venezuela. Les derniers événements confirment cette thèse.

Un coup porté à la coopération commerciale et technologique du Venezuela

Il y a 1 mois, quand les premiers bateaux en provenance d’Iran traversaient l’Atlantique pour rejoindre les Caraïbes et approvisionner en essence et en matériel technologique l’industrie pétrolière vénézuélienne, les porte-parole des Etats-Unis les avaient menacés pour qu’ils ne déchargent pas leurs chargements grâce au harcèlement de la Marine.

Mais une chose est de faire de l’intimidation envers un seul pays et une autre de le faire envers deux, surtout si l’un d’eux contrôle le Détroit d’ Ormuz, la principale voie de commerce pour le pétrole dans le monde par où passent tous les jours 1 baril de pétrole sur 5. C’est pourquoi les cargos sont parvenus à destination sans problèmes malgré les opérations psychologiques très mal exécutées.

Dans ce cas, étant donnée la dynamique émergente dans laquelle il existe un bloc montant qui défie l’hégémonie anglo-impériale, on ne s’est pas permis une action subordonnée aux intérêts de Washington en relation avec la stratégie des sanctions.

Mais ce qui se passe avec d’autres pays et d’autres entreprises dans le monde est un cas très différent. Prenons par exemple les cargos avec du brut vénézuélien qui se sont dirigés vers la Malaisie, Singapour, l’Indonésie ou le Togo, des pays où la présence des Etats-Unis est très forte et qui n’ont pas pu acheter de pétrole produit par PDVSA à cause des mesures coercitives unilatérales de la Maison Blanche et de la surveillance navale de la Marine sous ces latitudes.

C’est dans ces cas qu’on impose une coordination de la Marine et du Département du Trésor des Etats-Unis, bien que ce soit de façon non officielle.

A cause de cette stratégie, rien qu’en février 2020, le Venezuela estimait à 116 000 000 000 de $ les pertes causées par le blocus.

Provocations

Etant donné les derniers événements, nous pouvons conclure que le blocus naval tant annoncé contre le Venezuela soutenu par le Gouvernement Trump a été déployé de façon non officielle. Il ne fonctionne plus de façon frontale comme en 1902, quand des bateaux allemands, anglais et italiens ont encerclé le pays alors présidé par Cipriano Castro, ou même comme contre Cuba dans les années 60, quand les Etats-Unis int décidé que la souveraineté de l’Ile ne pourrait pas s’installer dans son « arrière-cour. »

Début avril a commencé une nouvelle phase d’escalade du blocus naval avec les « opérations anti-drogues » déployées dans l’Hémisphère Occidental par la Marine étasunienne. Celle-ci a ouvert l’espace pour les opérations psychologiques à grande échelle dans les Caraïbes et la coordination des forces et du renseignement du Commandement Sud avec des pays partenaires du Pentagone, surtout la Colombie et le Brésil.

C’est dans ce cadre qu’on doit comprendre la navigation d’un destroyer de la Marine étasunienne près des côtes vénézuéliennes, le mardi 23 juin, que le général Vladimir Padrino López, ministre de Défense du Venezuela, a qualifié « d’acte de provocation. »

Padrino López a prévenu que si des opérations de bateaux étasuniens ont lieu dans les eaux territoriales vénézuéliennes, il y aura une riposte « implacable » de la Marine Nationale Bolivarienne. « Ne vous aventurez pas dans nos eaux juridictionnelles avec vos bateaux de guerre pour naviguer ou réaliser des manœuvres militaires. »

Même si les provocations sont une tactique que la marine étasunienne a l’habitude d’utiliser contre ses adversaires en dépassant les limites maritimes non seulement dans les Caraïbes mais aussi ailleurs dans le monde (comme en Mer du Sud de la Chine ou même dans le Golfe Persique), généralement, les généraux yankees autorisent cette sorte d’opérations pour recueillir des informations inquiéter la partie adverse. Dans quels buts ? Militaires, commerciaux ou même les 2 ?

Sans aucun doute, la pression du Commando Sud et de ses destroyers maraudant dans les Caraïbes combinée avec la stratégie du Département du Trésor dessinent un cercle en haute mer et sur les côtes qui met en alerte la République Bolivarienne et porte atteinte du point de vue économique aux majorités qui vivent au Venezuela.

 

Source: Mision Verdad – Traduction: Françoise Lopez